Postulat n° 135 - Rapport final du Conseil communal

Résumé du postulat

Selon La Liberté du 9 janvier 2017, le quartier d’Alt serait le seul à Fribourg à bénéficier de conteneurs pour des déchets verts, malgré les 15 points de récolte que compte la Ville. Ceux-ci proposent uniquement la collecte de verre, de PET, d’huiles usées, d’alu ou encore des textiles. Les déchets verts peuvent être ramassés à domicile de mars à novembre via un abonnement gratuit.

Mais rares sont les propriétaires d’immeubles mettant à disposition de leurs locataires des conteneurs pour les déchets verts. De plus, ces types de conteneurs ne peuvent pas être installés dans tous les quartiers de la Ville de Fribourg, à l’instar de la rue de Lausanne.

Les déchets organiques de cuisine tels que les épluchures de légumes et de fruits, les coquilles d’œufs, le marc de café, etc. peuvent facilement être compostés lorsque l’on possède un jardin. Or, de nombreux habitants de certains quartiers de la Ville n’ont d’autre choix que de se rendre à la déchetterie des Neigles pour se débarrasser de ces déchets qui peuvent vite devenir encombrants.

Des solutions existent notamment via des conteneurs "écopoints" où l’on prévoit à cet effet, des collectes de porte-à-porte ou des lombricomposteurs.

Nous demandons ainsi au Conseil communal d’étudier la possibilité de diminuer ce type de déchets dans les sacs en plastique taxés pour les personnes qui n’ont pas la chance de pouvoir bénéficier d’un compost à proximité de leur domicile.

Réponse du Conseil communal

1.         Définitions, exigences légales

1.1. Définitions

Les déchets organiques de cuisine font partie des biodéchets qui, selon la définition de l’Office fédéral de l’environnement (OFEV), sont les déchets d’origine végétale, animale ou microbienne. Ce terme comprend notamment les déchets issus des ménages que sont les déchets verts et les déchets alimentaires. Les déchets de taille d’arbres et d’arbustes, les coupes d’herbe et les déchets issus de l’entretien de bordures de routes et de parcs font notamment partie des déchets verts.

1.2. Bases légales

Dans son article 12, l’ordonnance sur la limitation et l’élimination des déchets (OLED; RS 814.600) mentionne une obligation générale de valorisation des déchets selon l’état de la technique. Dans son article 14, l’ordonnance précise les conditions de valorisation des biodéchets. La priorité doit être donnée, sous conditions, à une valorisation matière (compost par exemple) ou à la méthanisation (production de biogaz). L’utilisation d’engrais de recyclage issus du compostage ou de la méthanisation doit répondre à certaines exigences de qualité. En particulier, la teneur en matières synthétiques ne doit pas excéder 0.1% du poids de la matière sèche.

La restauration est soumise à des règles particulières. Elle est notamment soumise aux exigences de l’ordonnance concernant les sous-produits animaux (OSPA; RS 916.441.22). Les établissements de restauration sont légalement tenus de remettre les restes de cuisine à un repreneur autorisé.

2.            Situation actuelle de la récolte en ville de Fribourg

2.1. Déchets organiques: collecte et statistiques

Actuellement, les déchets organiques peuvent être déposés en vrac à la déchetterie centrale des Neigles et au Jardin botanique de l’Université de Fribourg. Accessoirement, l’association du quartier d’Alt gère un compost. De, plus, la Ville de Fribourg propose un service de ramassage des déchets en porte-à-porte au moyen de conteneurs normés.

Il est à noter qu’une partie du parc immobilier de la Ville ne permet pas l’équipement en bac normé, ceci faute de place suffisante. De plus, les odeurs, le lavage des bacs et la garantie de la qualité constituent des problématiques importantes dont il faut tenir compte pour la collecte.

Les déchets organiques admis et non admis à la collecte sont listés sur le site Internet dédié de la Ville de Fribourg. Par exemple, les épluchures de légumes du ménage peuvent être reprises; par contre, les restes d’aliments cuits ne sont pas admis à la collecte.

En 2019, la Ville de Fribourg a collecté 17'795 tonnes de déchets. Sur cette masse de déchets, la fraction des déchets organiques valorisés est de 15%, c’est-à-dire 2'653 tonnes. Pour ces derniers, les filières d’élimination sont le compostage ou la méthanisation, lorsque la qualité requise pour du compost n’est pas atteinte.

2.2. Consommation des ménages

Selon l’OFEV, les ménages suisses produisent annuellement environ 1 millions de tonnes de déchets alimentaires, dont près de 480'000 tonnes sont jetées comme ordures ménagères. Selon une enquête de cet office, la masse des biodéchets représente en moyenne 32% des ordures.

En 2018 et 2019, la Ville de Fribourg a procédé à un inventaire par échantillonnage ponctuel de sacs à ordures ménagères. En moyenne, 43% du contenu d’un sac poubelle étaient constitués de déchets biogènes. En comparaison avec la moyenne suisse, les habitants de la Ville de Fribourg jettent plus de déchets organiques. Il convient toutefois de prendre ces chiffres comme des ordres de grandeur car la base statistique reste entachée d’incertitudes.

En 2019, 7'188 tonnes d’ordures ménagères ont été incinérées. Avec une population totale de la Ville de 41'214 personnes, environ 75 kg de déchets organiques par an et par habitant sont incinérés en usine d’incinération des ordures ménagères (UIOM).

3.         Résultats de sondages concernant la gestion des déchets

Entre le 4 août et le 9 septembre 2020, le secteur Energie et développement durable (EDD) a procédé à un sondage à la population concernant la gestion des déchets. Les sondé·e·s ont mentionné que les déchets biogènes (déchets organiques et restes alimentaires) constituent le principal déchet qui devrait être récupéré séparément auprès des ménages. Deux tiers des sondé·e·s sont favorables à une collecte des restes alimentaires. La moitié des sondé·e·s, en particulier les locataires et les personnes ne disposant pas d’un extérieur, sont favorables à une collecte centralisée des déchets organiques.

En août 2020, la COSEDEC a présenté les résultats d’un sondage effectué en Suisse romande concernant la gestion des biodéchets. Ce sondage faisait suite au constat de terrain que 30% des poubelles d’ordures ménagères sont des biodéchets et que la qualité des biodéchets n’est pas garantie (présence de sacs plastiques non compostables, de nourriture emballée, etc.). A la question de la ou des raisons pour lesquels les sondé·e·s ne font pas le tri des déchets organiques, la problématique des odeurs est évoquée en premier, suivie par l’absence de collecte à proximité et l’absence de place dans le logement.

4.         Collecte des déchets biogènes

4.1. Ce que fait la Ville de Fribourg

Historique

Historiquement, le projet de compostage décentralisé a démarré en 1991. Entre 1992 et 1996, 11 composts de quartier avaient été déployés sur le territoire communal. Le contenu des conteneurs verts a connu de nombreux problèmes de qualité tout au long de leur mise à disposition (déchets non compostables; plastiques, papier, etc.). Après l’introduction de la taxe au sac en 1998, les composts de quartier connurent une forte augmentation des quantités, rendant irréalisable une gestion basée sur le volontariat. En parallèle, ces composts reçurent de nombreux déchets indésirables. Entre 1999 et 2000, le secteur de la Voirie posa des conteneurs de 800 litres sur les emplacements de compost de quartier, qui fermèrent en majorité. Au cours du deuxième semestre 2001, les conteneurs verts sont supprimés et remplacés par un système de collecte en porte-à-porte.

Situation jusqu’à fin 2020

La Ville de Fribourg organise une collecte généralisée des déchets verts sur le territoire communal. La collecte a lieu tous les mardis, hors fériés, dans les rues de la Ville. Elle se fait dans des bacs normés, munis d’une étiquette officielle. De décembre à mars, la collecte des déchets organiques se faisait sur inscription auprès du secteur de la Voirie. Cette situation va évoluer en 2021 (voir ci-après).

En sus de la collecte en porte-à-porte, le secteur de la Voirie collabore avec le compost du quartier d’Alt et avec le Jardin botanique. Concernant le quartier d’Alt, la Ville, par le secteur précité, soutient logistiquement et financièrement le groupe du quartier qui gère le compost. Du point de vue financier, la Ville de Fribourg dédommage le groupe de quartier en fonction du tonnage annuel traité. En 2019, le compost du quartier a traité environ 5.6 tonnes de déchets organiques.

Concernant le Jardin botanique, la Ville apporte un soutien financier et logistique. Jusqu’en 2019, le Jardin botanique gérait seul son compost. L’accès étant ouvert au public et la quantité annuelle traitée en augmentation, d’entente avec le Jardin botanique, la Ville de Fribourg, soucieuse de maintenir un des rares points de collecte des déchets verts hors ramassage porte-à-porte, apporte un soutien logistique au Jardin. De ce point de vue, la Voirie a mis à disposition une benne pour la récolte des déchets biogènes, qu’elle va récupérer sur appel.

Enfin, les déchets organiques peuvent également être déposés "en vrac" dans la benne prévue à cet effet à la déchetterie principale des Neigles.

Evolution pour 2021

A partir de la période hivernale 2020-2021, la collecte des déchets verts ne se fera plus sur annonce mais sera organisée comme le reste de l’année. Cette mesure vise à simplifier le ramassage et à encourager le recyclage des déchets organiques en période hivernale également.

4.2. Elaboration d’un concept global de gestion des déchets

Comme mentionné dans les rapports en réponse aux postulats 90 et 106, le 28 aout 2019, la Direction de l’Edilité́, par l’intermédiaire du Service du génie civil, de l’environnement et de l’énergie, a lancé́ un vaste projet d’étude. L’objectif de cette étude est de disposer d’une meilleure connaissance de la gestion globale des déchets sur le territoire communal de la Ville de Fribourg et de proposer une optimisation de cette gestion d’un point de vue organisationnel, environnemental et financier. La thématique des déchets biogènes constitue un des axes de travail de cette étude. Plusieurs scénarii de gestion des déchets verts et des restes alimentaires sont à l’étude.

Une piste serait de développer, si possible, des points de récolte sur le modèle du Jardin botanique. La recherche, puis le développement éventuel de points de collecte centralisés, fera l’objet d’un projet porté par les secteurs de la Voirie et de l’Energie et développement durable. Le projet démarrera en 2021 et sera poursuivi les années suivantes, en fonction des opportunités qui pourraient se présenter.

Consciente que la gestion des déchets biogènes répond à une attente de la population, la Ville propose, comme mesure transitoire, de soutenir l’achat de lombricomposteurs par les particuliers au moyen d’une subvention individuelle unique (montant total maximal prévu: 5'000.- francs/an, pour la période 2021 à 2023). La Ville accorderait un soutien de 25% du coût d’achat d’un lombricomposteur, au maximum de 100.- francs. Le lombricompostage consiste à transformer des déchets de cuisine par l’action de vers et d’autres organismes du même écosystème, ceci dans le cadre d’un processus adapté pour l’intérieur.

4.3. Financement des déchets

La gestion des déchets obéit à des règles particulières concernant le financement. En effet, la législation cantonale exige que la commune prélève une taxe couvrant au moins 70 % des frais d'élimination des déchets urbains. La moitié de cette taxe au moins doit être proportionnelle à la quantité de déchets, calculée selon leur volume ou leur poids.

En 2021, le budget prévoit un revenu de 2.03 millions de francs en lien avec la taxe proportionnelle. En faisant l’hypothèse que, au moyen d’une collecte ad hoc, 20% des déchets étaient extraits des ordures ménagères pour être valorisés, il faudrait s’attendre à une diminution de revenus d’environ 400'000 francs (avec l’hypothèse de 20% de sacs bleus vendus en moins) et à une diminution des charges d’environ 85'000 francs.

Ces chiffres constituent une évaluation très sommaire des impacts financiers. Nonobstant la précision des chiffres, le constat qui peut être fait au stade actuel est que la diminution des revenus serait probablement plus forte que la diminution des charges.

Le budget 2021 prévoit une répartition équilibrée entre la taxe de base et la taxe proportionnelle (taxe au sac). Une baisse de revenu dans la taxe proportionnelle créerait un déséquilibre en faveur de la taxe de base, ce qui n’est pas conforme à la législation cantonale en vigueur. Il serait donc nécessaire de développer un mécanisme de financement qui permette de compenser cette différence et de respecter les exigences légales, tout en conservant un effet incitatif visant à éliminer les déchets d’une manière respectueuse de l’environnement.

5.         Conclusion

En Ville de Fribourg, le constat est fait que les ordures ménagères sont constituées d’une part relativement importante de déchets biogènes. Il y a donc un potentiel de valorisation de ces déchets sous forme de compost ou de biogaz, ce qui irait dans le sens du développement durable, de la politique énergétique de la Ville et de l’économie circulaire.

Le Conseil communal est évidemment favorable à la valorisation de cette matière. Il relève toutefois que la gestion des déchets biogènes est complexe en raison des contraintes légales, logistiques et financières. La garantie de la qualité des déchets dans la filière constitue un enjeu majeur pour la réussite de la collecte. Il est en effet non pertinent, écologiquement et économiquement, de mettre en place une collecte généralisée des déchets biogènes si la qualité est insuffisante pour permettre leur valorisation. Dans ce cas, les déchets seraient finalement dirigés vers une filière de valorisation thermique (incinération en UIOM). Cette situation priverait la Ville des ressources financières nécessaires à la valorisation thermique des déchets.

Le Conseil communal est d’avis que la gestion des déchets organiques ne peut pas être traitée de manière indépendante de la gestion des autres déchets urbains. Elle doit faire partie d’une vision globale de gestion des déchets au niveau communal. Cette stratégie globale fait l’objet d’une étude en cours.

Dans l’attente de cette stratégie globale prévue pour 2021/2022 et du nouveau règlement de gestion des déchets, le Conseil communal propose de soutenir, dans la limite de ses budgets, les éventuels nouveaux composts de quartier de manière similaire à ce qu’elle fait actuellement pour celui du quartier d’Alt ainsi que l’acquisition de lombricomposteurs.

Le postulat n° 135 est ainsi liquidé.