Résumé du postulat
Le postulat est argumenté comme suit:
"En raison de la crise sanitaire liée à la covid-19, il a été décidé, en mai dernier, de faciliter l’agrandissement des terrasses des établissements publics fribourgeois. Cette mesure contribue, encore aujourd’hui, à maintenir, autant que possible, la capacité d’accueil des restaurants, cafés, bars et autres buvettes. En cette période de pandémie, elle permet aussi de rendre la ville plus attractive et vivante. L’agrandissement des terrasses a joué un rôle important tant au niveau économique que de la qualité de vie des Fribourgeois-es. Raison pour laquelle nous demandons au Conseil communal d’étudier la possibilité de rendre ces agrandissements permanents. Nous demandons enfin au Conseil communal de renoncer à la perception des taxes d’empiètement du domaine public en période de pandémie ou de situation extraordinaire, mais aussi de faciliter et d’accélérer les éventuelles procédures d’autorisation y relatives".
Réponse du Conseil communal
Procédure ordinaire d’autorisation pour les terrasses
Au cours de l’année 2016, il a été décidé d’adapter les Conditions Générales de la Police locale en matière de terrasses d’établissements publics, qui jusqu’alors faisaient office de référence pour l’octroi d’une autorisation d’exploiter une terrasse. Dans ce cadre, un certain nombre d’assouplissements ont été introduits afin que les cafetiers-restaurateurs puissent tirer profit au mieux des possibilités d’utilisation de leur terrasse.
Dans le but de garantir une meilleure lisibilité et une plus grande clarté des règles applicables, celles-ci ont été matérialisées dans une directive du Conseil communal. Plusieurs adaptations ont été faites, dont une concernant la règle de l’implantation des terrasses. A l’origine, la règle de base prévoyait que l’installation d’une terrasse ne pouvait être autorisée que dans l’espace jouxtant directement la
façade de l’établissement public sur le domaine public. La directive a assoupli ce principe en admettant, lorsque les conditions locales le permettent et pour autant qu’aucun espace n’existe devant l’établissement ou que celui-ci est insuffisant, la possibilité d’aménager une terrasse non attenante à l’établissement sur le domaine public, à proximité immédiate de ce dernier. Tel est par exemple le cas du restaurant Capricciosa, à la rue Pierre-Aeby, dont la terrasse est installée sur la place du Marché-aux-Poissons voisine. Un tel scénario pourrait également être envisagé dans le cadre de la requalification du quartier du Bourg ou à la place du Petit-Saint-Jean, l’espace public à disposition se prêtant à une telle configuration, ou tout autre endroit réunissant les conditions nécessaires.
La mise en place d’une terrasse sur le domaine public nécessite plusieurs autorisations cantonales et communale. En effet, l'usage accru d'une chose du domaine public, tel que l’exploitation d’une terrasse, consiste en son utilisation plus intense conforme ou non à sa destination. Il doit être compatible avec un minimum d'usage commun et doit faire l’objet d’une autorisation de construire. Dans ce cadre, toute nouvelle terrasse, respectivement tout agrandissement d’une terrasse existante, doit faire l’objet d’une demande de permis de construire et être mis à l’enquête publique durant 14 jours en procédure ordinaire. Une fois le permis délivré, l’exploitant doit obtenir une extension de sa patente auprès du Service de la police du commerce (SPoCo) et, en dernier lieu, une autorisation communale d’empiètement pour l’usage du domaine public. Cette autorisation annuelle est soumise à une taxe d’utilisation, conformément au règlement concernant les taxes d'empiètement sur le domaine public communal. La taxe varie de 40 à 80 francs par m2 par année en fonction de la zone dans laquelle la terrasse est située.
L’exploitation d’un établissement public, respectivement d’une terrasse, est donc soumis à de nombreuses contraintes légales. Celles-ci impliquent l’intervention des services compétents en matière d’aménagement du territoire (SeCa), d’environnement – en particulier de protection contre le bruit (SEn) – de sécurité et d’hygiène alimentaire (SAAV) ou encore de sécurité et d’ordre publics (Police cantonale et Préfecture), pour ne citer que les principaux. Ces services imposent en effet dans leurs préavis, aux différents stades des procédures d’autorisation, leurs propres conditions pour l’exploitation d’un établissement public. En matière de protection contre le bruit, par exemple, l’exigence de procéder à une évaluation préventive des nuisances sonores lors de la création d’une nouvelle terrasse, respectivement lors de l’agrandissement d’une terrasse existante, est une problématique particulièrement sensible qui conduit presque systématiquement à des restrictions d’exploitation au niveau des horaires ou des jours d’ouverture. Lorsque l’évaluation démontre que les valeurs limites d’exposition au bruit sont atteintes, une expertise acoustique par un bureau spécialisé peut en outre être requise. Ces contraintes découlant des exigences légales strictes imposées au niveau cantonal en matière de protection contre le bruit constituent actuellement un frein important à l’agrandissement des terrasses existantes ainsi qu’à la création de nouvelles terrasses, en particulier dans des secteurs où nombre d’entre elles sont déjà implantées.
Considérant que les terrasses contribuent grandement à l’animation de l’espace public, la Ville de Fribourg a toutefois pris l’initiative de mettre en place certaines mesures visant à favoriser leur création et leur développement. C’est ainsi que pour faciliter les démarches que doivent accomplir les cafetiers-restaurateurs, la procédure de mise à l’enquête publique est désormais gérée par la Ville elle-même, via son Service de la police locale et de la mobilité. Ce dernier établit le plan de la surface maximale d’empiètement pouvant être autorisée, commande le plan de géomètre et se charge des différentes formalités administratives liées à la préparation du dossier de mise à l’enquête jusqu’à la délivrance du permis de construire. L’établissement des plans, les heures de travail ainsi que le préavis communal ne sont pas facturés aux exploitants, qui économisent ainsi non seulement un
temps précieux mais également un montant conséquent puisqu’ils n’ont plus besoin de mandater, à leurs frais, un architecte pour effectuer ces démarches. Cette mesure, qui a été introduite au début de l’année 2021, a grandement contribué à l’augmentation du nombre de terrasses présentes sur le domaine public. A ce jour, la Ville compte 98 terrasses exploitées et 27 dossiers sont en cours (pour des nouvelles terrasses et/ou agrandissement) alors que nous n’en dénombrions "que" 71 en 2015.
Procédure extraordinaire d’exploitation des terrasses durant la pandémie de Covid-19
Afin d’atténuer les conséquences négatives que les différentes mesures et restrictions sanitaires ont induites pour l’exploitation des établissements publics et les cafetiers-restaurateurs, la Conférence des Préfets a décidé de faciliter, au niveau cantonal, l’exploitation des terrasses en permettant leur agrandissement provisoire. C’est ainsi qu’en date du 28 mai 2020, une procédure spéciale d’autorisation relative à l’agrandissement des terrasses des établissements publics durant la pandémie de Covid-19 a vu le jour. Une mise à jour de cette Directive a été apportée le 28 mai 2021, pour en préciser les modalités d’application. Cette Directive offre la possibilité d’agrandir les terrasses existantes qui sont déjà au bénéfice d’un permis de construire en force pour une telle installation, à différentes conditions:
a) Le nombre total de places assises autorisées sur la terrasse reste le même, conformément à la patente.
b) L’agrandissement ne donne lieu à aucune immission supplémentaire.
c) Le ou la propriétaire du fonds a donné son accord.
d) L’agrandissement ne va pas à l’encontre d’autres intérêts publics, telle que la sécurité routière.
e) Les limites de la terrasse sont reconnaissables par le public.
Avec la mise à jour du 28 mai 2021, cette demande peut aussi être formée par les établissements publics qui ont entrepris une procédure de permis de construire en vue de la création d’une terrasse, pour autant que la demande ait été mise à l’enquête et n’ait pas suscité d’opposition. Il s’agit en quelque sorte d’une autorisation d’installer une terrasse avec effet anticipé. La Ville de Fribourg a pleinement profité de ce régime extraordinaire et autorisé, depuis l’année 2020, tous les établissements publics qui le souhaitaient à élargir temporairement leurs espaces de terrasse sur le domaine public. Ainsi, 49 terrasses ont pu être élargies temporairement durant la saison 2021.
Il est à noter que cette procédure a à l’origine été mise en place pour permettre aux exploitants de compenser la perte de capacité qu’ils subissaient du fait des règles de distanciation imposées entre les tables. Il était ainsi nécessaire que les exploitants disposent d’un espace plus conséquent sur le domaine public pour pouvoir maintenir la capacité d’accueil maximale autorisée par leur patente. Malgré la disparition de cette règle de distance, cette facilité a néanmoins été maintenue en 2021 et a permis aux cafetiers-restaurateurs de pouvoir travailler dans des conditions optimales. La procédure spéciale n’a en revanche jamais eu pour objectif d’augmenter la capacité d’accueil des terrasses, qui est ainsi restée la même qu’en temps ordinaire. Ainsi, pour les motifs sanitaires précités, seule la surface dévolue à l’activité a été étendue depuis le début de la pandémie.
Ce concept de dérogation a été prolongé et adapté aux conditions hivernales. Afin de permettre à la branche de la restauration de maintenir un chiffre d’affaires suffisant, le Conseil d’Etat a autorisé, par un arrêté du 12 octobre 2021, l’installation de terrasses d’hiver à l’intérieur du périmètre étendu préalablement autorisé pour les terrasses d’été. Ainsi les terrasses peuvent être chauffées à certaines conditions. Le régime mis en place est extrêmement souple et ne nécessite la délivrance d’aucune autorisation supplémentaire, seule une annonce du type de chauffage étant exigée de la part des exploitants.
Concernant la demande du postulat visant à renoncer à la perception des taxes d’empiètement du domaine public en période de pandémie ou de situation extraordinaire, il est rappelé ici que pour l’année 2020, le Conseil communal a décidé de débloquer un montant extraordinaire de 3 millions de francs afin de venir en aide aux acteurs économiques les plus touchés. Dans ce cadre-là et sur proposition de la Direction de la police locale et mobilité, le Conseil communal a notamment décidé d’annuler les taxes d’empiètement relatives aux terrasses des établissements publics durant l’année 2020. Etant donné la prolongation de la pandémie et de ses effets négatifs vis-à-vis du secteur de la restauration, cette mesure a été reconduite pour l’année 2021.
Il est également à relever que le règlement général de police et le règlement concernant les taxes d’empiètement sur le domaine public communal sont actuellement en pleine révision. L’avant-projet de règlement général de police, qui englobera les taxes relatives aux empiètements temporaires aujourd’hui prévues dans un règlement séparé, sera mis en consultation au cours du premier trimestre 2022 auprès des partis politiques ainsi que des associations de quartier et de commerçants. Les auteurs du postulat pourront dès lors faire part de leurs remarques sur les exemptions proposées à ce moment-là.
Cela étant, le Conseil communal estime qu’il n’est pas approprié d’inscrire le principe général d’une exemption générale de taxe en cas de pandémie ou de situation extraordinaire dans un règlement, dans la mesure où d’autres moyens le permettent en cas de nécessité.
Prise de position sur le postulat
Après avoir rappelé les procédures ainsi que le cadre légal régissant l’octroi des autorisations en matière d’exploitation de terrasses en temps ordinaire et durant la période de Covid-19, le Conseil communal prend plus précisément position de la manière suivante sur les propositions du postulat.
Il est tout d’abord important de rappeler que l’agrandissement des terrasses durant la période Covid n’induit pas la possibilité d’exploiter un plus grand nombre de places. En effet, la capacité d’accueil autorisée dans le cadre d’une extension de terrasse reste la même que d’ordinaire, le nombre de places maximales autorisées étant fixé dans la patente. De plus, de pratique constante dans notre canton, le SpoCo n’autorise pas les établissements publics à bénéficier d’une capacité d’accueil en terrasse supérieure à celle autorisée pour l’intérieur des locaux. Cette règle limite donc la marge de manœuvre pour l’extension des terrasses.
Comme susdit, l’usage accru du domaine public est un usage plus intense de ce dernier mais qui doit rester compatible avec un minimum d’usage commun. En vertu de ce principe, il est indispensable de garantir un minimum d’usage commun du domaine public, afin que l’ensemble des usagers et des autres acteurs économiques puisse également en profiter. Tel est par exemple le cas des commerçants qui disposent d’un droit privilégié de pouvoir accéder au domaine public pour développer leur activité économique, par exemple pour maintenir une vue dégagée sur leurs vitrines ou pour y installer un éventaire de marchandises ou une réclame mobile. Parmi les autres paramètres essentiels à prendre en compte il y a la circulation des piétons, l’intervention des véhicules d’urgence ou encore l’accessibilité pour les livraisons. Dans tous les cas, les droits des tiers doivent être préservés. Ce principe fondamental exclut donc, dans la majorité des cas, la possibilité d’étendre durablement les terrasses de manière latérale en milieu urbain.
Les terrasses sont, pour la plupart, actuellement déjà dimensionnées au maximum de leur potentiel, la profondeur maximale de l’espace situé dans le prolongement des locaux abritant l’établissement public étant généralement exploitée. Une extension latérale permanente des surfaces de terrasses, comme c’est souvent le cas actuellement durant la période de pandémie, poserait de nombreux problèmes car elle induirait une sur-occupation du domaine public ainsi qu’une incompatibilité avec les autres usages que ce dernier doit être en mesure de garantir. A cela s’ajoute le fait qu’une éventuelle extension latérale des terrasses devrait dans tous les cas faire l’objet d’une mise à l’enquête préalable. Or, si certains exploitants d’établissement public pourraient peut-être bénéficier de terrasses agrandies, il est plus que probable que d’autres se verront refuser cette possibilité en raison d’oppositions de tiers. Un autre point important doit également être considéré, à savoir que les situations peuvent évoluer: il est en effet fréquent que des établissements publics ou des commerces changent de propriétaire et que le nouveau voisin d’un établissement public au bénéfice d’une terrasse étendue, ne serait pas d’accord que ladite terrasse empiète devant son local. De telles situations conflictuelles doivent être évitées.
Pour tous ces motifs, il ne se justifie pas de modifier les règles actuelles en matière d’implantation des terrasses sur le domaine public. Celles-ci correspondent d’ailleurs aux règles pratiquées en Suisse pour l’aménagement des terrasses d’établissements publics.
Il n’est de plus pas démontré que les cafetiers-restaurateurs manqueraient de place à l’heure actuelle et qu’ils souhaiteraient augmenter leur capacité d’accueil. Si des exploitants devaient en faire la demande, il va de soi que les requêtes seront soigneusement étudiées et que, si les conditions légales, la configuration des lieux et l’espace à disposition le permettent, une autorisation pourra être envisagée et les surfaces actuelles bénéficiant d’un potentiel pourront être étendues, sous réserve de l’issue favorable des procédures nécessaires.
Le Conseil communal s’engage à continuer à s’investir pour pouvoir offrir des conditions d’exploitation les plus favorables possibles aux établissements publics. Il souligne aussi que le nombre de terrasse a augmenté de façon significative ces dernières années, ce qui démontre que le régime mis en place à l’heure actuelle fonctionne bien et qu’il n’y a donc pas de motif de le faire évoluer.
Pour ces motifs, le Conseil communal n’entend pas donner suite aux propositions du postulat.
Le postulat n° 167 est ainsi liquidé.