I. Sob (Le Centre/PVL), A. T. Fontes Martins (Le Centre/PVL)
Développement du postulat
Le Conseil communal est invité à mettre en place des moyens pour permettre aux personnes ayant un handicap visuel d’exercer leurs droits civiques sans l’assistance d’une tierce personne.
Dans le cadre du porte-à-porte effectué en vue des élections communales 2021, un habitant du quartier du Jura, aveugle, nous a parlé de l’impossibilité dans laquelle il se trouvait d’exercer ses droits politiques, malgré son intérêt pour la chose, en raison du système actuel qui l’empêchait de remplir seul un bulletin de vote. En effet, actuellement il devrait se faire assister d’une personne pour remplir son bulletin de vote, mais une telle démarche n’est de son point de vue pas envisageable car l’exercice de ses droits civiques devrait lui permettre de pouvoir les exercer seul, sans intermédiaire. Dans l’attente de l’introduction du droit de vote électronique, il nous a confié que l’État le privait de la possibilité d’exercer ses droits politiques vu l’absence de solutions alternatives.
Le vote à bulletin secret, qui est la modalité de vote prévue à Fribourg (≠ du système de la Landsgemeinde connu en Suisse centrale), soit par le fait de déposer ou de faire déposer son bulletin dans une enveloppe fermée dans une urne électorale jusqu’à son dépouillement, n’est pas garanti pour ces personnes. Alors que la loi garantit à certain·e·s citoyen·ne·s la possibilité d’exercer seul·e cette citoyenneté active, il ne prévoit pas les aménagements nécessaires à d’autres citoyen·ne·s (en situation de handicap visuel) pour respecter le droit de vote à bulletin secret : nous sommes donc dans une démocratie à deux vitesses.
Dans sa réponse à une intervention d’une ancienne élue PLR (cf. postulat n°19 transmis le 29 mars 2017), Eleonora Schneuwly-Aschwanden, le Conseil communal avait évoqué, dans son rapport publié le 27 mars 2018, les différentes solutions mises en œuvre pour faciliter aux personnes en situation de handicap visuel l’accès à différentes informations sur les enjeux politiques, notamment les explications en vue des votations cantonales qui sont fournies sur support audio. Ce rapport ne prévoyait pas l’adoption d’une mesure concrète qui pourrait être perçue comme un signal pour ces personnes, citoyennes à part entière s’agissant de leurs devoirs (contributions fiscales, etc.), mais non pas pour ce qui concerne l’exercice de leurs droits les plus fondamentaux : et oui, c’est ici l’endroit de le rappeler, la Constitution suisse garantit les droits politiques ; en cela, elle protège "l’expression fidèle et sûre [de la] volonté [des citoyen·ne·s]" (cf. art. 34 Cst.).
En matière d’organisation de votations communales, le Conseil communal dispose d’une compétence exclusive sur la base de l’art. 10 al. 2 let. A LEDP ce qui lui donne toute latitude pour agir s’agissant de l’aménagement d’une infrastructure communale de vote adaptée.
Parmi les solutions possibles, on peut par exemple imaginer un système de poinçonnage du bulletin de vote en actionnant des manettes pour le "oui" ou le "non". Cet équipement du local de vote de la Ville de Fribourg entrainerait un signal fort et les dépenses occasionnées resteraient quant à elles raisonnables au vu de l’enjeu.
Quand bien même d’après une statistique parue en 2020 (cf. rapport de l’UCBA), 4% de la population suisse serait concernée par le handicap visuel et que cette proposition ne porte que sur les votations communales, nous sommes persuadées que la solution mise en œuvre par le Conseil communal permettra d’envoyer un signal fort en Suisse, aux autres communes et cantons, dans l’attente de la possibilité de concrétisation d’une solution unifiée et, probablement, digitale.
Fribourg, le 31 mai 2022