Question n° 266 (2021-2026) - Développement du chauffage à distance (CAD) en ville de Fribourg

R. Casazza (PLR)

Question

J'aurais quelques questions concernant le développement du chauffage à distance (CAD) en ville de Fribourg.

Tout d’abord, je déclare mes liens d’intérêts. Je suis un nouvel habitant du quartier de Gambach, qui sera raccordé au CAD d’ici septembre 2024 et qui se réjoui(ssai)t, un peu naïvement peut-être, d’être chauffé bientôt au renouvelable au lieu du mazout, mais qui vient d’apprendre que la chaleur du CAD sera produite à partir de gaz fossile via une chaudière à gaz soi-disant provisoire, mais qui risque de fonctionner des années! Je suis accessoirement aussi directeur-associé du bureau Triform, actif dans le domaine de l’eau et des énergies renouvelables, et un peu entrepreneur.

Je me réfère également à la question n° 239 de M. Jérémie Stöckli et au postulat n° 92 de M. Christophe Allenspach, tous deux traités récemment.

Tout d'abord, je me permets de citer le Groupe E Celsius, dont la Ville de Fribourg est actionnaire, certes minoritaire, mais de près de 30%, sur son site internet https://www.groupe-e.ch/fr/energie/chaleur/clients-prives/chauffage-a-distance "Le chauffage à distance est une solution qui s’inscrit dans la transition énergétique. Les énergies utilisées sont renouvelables et de ressources locales. Quant aux combustibles fossiles, ils ne sont utilisés que si nécessaire comme énergies d’appoint et de secours. La valorisation du bois des forêts, de l’eau des lacs, du biogaz ou des ordures ménagères font de ce système de chauffage une solution durable. Les émissions de CO2 sont également fortement réduites".

De plus, je cite également la brochure disponible sur le même site:

"Vos avantages:

  • Diminution d’émissions de CO₂
  • Énergie locale et renouvelable
  • Gestion optimale de la chaleur
  • Diminution des frais d’entretien
  • Pas de maintenance périodique
  • Gain d’espace dans le local de chauffage"

J’arrive aux questions, même si je souhaite encore illustrer la situation. On se trouve dans le cas où le ou la citoyen·ne désirant passer à la voiture ou mieux au vélo électrique découvre que son électricité ne provient que de centrales à charbon, et ce pendant plusieurs années. Cela peut vous paraître stupide ou absurde, mais c’est la situation qui se produit actuellement en ville de Fribourg avec les micro-CAD isolés, non raccordés à FRICAD, donc renouvelables, distants de quelques centaines de mètres et qui sont alimentés par de la chaleur produite avec du gaz fossile! Les citoyen·ne·s ont des raisons de se sentir floués.

 Mon intervention vise à éviter un postulat. Voici mes questions.

  1. Quelle est la part réelle d'énergie renouvelable contenue dans le CAD distribué dans le réseau de la ville de Fribourg en 2024, et pas celle sur le catalogue?
  2. Quel est le degré d'avancement des travaux de raccordement au CAD en ville de Fribourg et quelles en seront les prochaines échéances?
  3. Combien de quartiers ou secteurs sont raccordés au CAD avec une production d'énergie fossile "provisoire ou d’appoint ou de secours"? Lesquels et pour quel laps de temps?
  4. Comment se fait-il que certains quartiers, comme le quartier de Gambach, aient subi d’importants travaux ces dernières années pour raccorder les habitations au CAD, mais que l’énergie utilisée reste non-renouvelable?
  5. A quoi sert un micro-CAD dans un quartier comme Gambach s’il est de facto raccordé au gaz? Pour l’anecdote, j'ai un voisin possède une chaudière à gaz, qui se raccorde au CAD, et qui sera chauffé au gaz. Pourquoi le micro-CAD de Gambach, n’est-il pas raccordé à FRICAD, c'est-à-dire renouvelable, alors qu’il reste a priori moins de 500 mètres pour se connecter à la branche qui arrive à la route de Bertigny depuis l'HFR? Quand est-ce que ce quartier sera effectivement alimenté en chaleur renouvelable?
  6. Quand est-ce que les travaux de raccordement du CAD planifiés en ville de Fribourg seront terminés de manière effective?
  7. Quel sera le taux d'énergie renouvelable dans le CAD lorsque les travaux de raccordement seront terminés?
  8. Est-ce que le CAD en ville de Fribourg dispose de suffisamment de chaleur renouvelable, c'est-à-dire plus de 75%? En cas de déficit en chaleur renouvelable dans le CAD, comment le Conseil communal prévoit-il de le combler?
  9. Est-ce qu’il s’agit de publicité mensongère sur le site de Groupe E Celsius, dont la Ville est actionnaire, de lire: "Quant aux combustibles fossiles ils ne sont utilisés que si nécessaire comme énergies d’appoint et de secours"? Que signifie cette phrase?
  10. Est-ce que des indemnités, des dédommagements ou des rabais sont prévus aux clients aussi longtemps que la promesse de la publicité n’est pas réalisée? Si non, pourquoi?
  11. Que fait l'actionnaire Ville de Fribourg, même minoritaire, pour corriger rapidement cette situation et faire en sorte que l’énergie utilisée dans le CAD provienne effectivement de sources renouvelables?

Est-ce que le gaz utilisé dans ces centrales "d’appoint" possède au moins des certificats biogaz renouvelable?

Réponse partielle du Conseil communal

Je me permets de souligner que le Grand Conseil a accepté à l'unanimité une motion hier soir visant à avoir plus de transparence dans la mixité des différents réseaux de fourniture d'énergie. Si je dis "unanimité", cela veut dire y compris des membres du Conseil communal et du Conseil général qui siègent au Grand Conseil. Nous répondrons aux différentes questions lors d'une prochaine séance, mais je me permets de relever la précision que M. R. Casazza a apportée, à savoir que ce n'est pas un postulat mais une question. Les réponses apportées seront des réponses à une question et non pas à un postulat. Si c'est une question ou un postulat, le travail au niveau de l'administration est différent. D'autre part, en respectant tant la loi sur les communes et le RCG, nous répondrons avant tout aux questions qui sont du ressort de l'administration communale. Nous ne répondrons pas sur les éléments qui concernent spécifiquement Groupe E Celcius.

Réponse du Conseil communal

Dans le cadre de l’établissement de son plan communal des énergies en 2018, la Ville de Fribourg a, dans son rôle de planificatrice, dessiné les contours du développement des futurs réseaux CAD de son territoire. Comme mentionné justement par M. le Conseiller général R. Casazza, la Ville de Fribourg ne développe pas elle-même les CAD sur le territoire communal. Actuellement, Groupe E Celsius SA y construit un réseau et une offre commerciale. La Ville de Fribourg est actionnaire minoritaire (27.29%; 2 sièges sur 7 dans le Conseil d’administration) de Groupe E Celsius SA.

De son côté, la Ville de Fribourg travaille sur les conditions-cadres. Elle a par exemple défini les secteurs dans lesquels les réseaux doivent se développer, ainsi que l’ensemble des potentiels d’énergie renouvelable du territoire pour les alimenter en chaleur. La Ville renvoie à cet effet à la publication de la commune "Fribourg et sa transition énergétique 2019 – 2035 ". Les autres engagements de la commune en matière de transition énergétique sont décrits dans le catalogue de mesures d’accompagnement de la planification énergétique.

Il est vrai que le développement des réseaux de chaleur prend du temps, et il en prendra encore beaucoup. Les travaux associés sont gigantesques et les investissements liés se montent à plusieurs centaines de millions de francs. Dans le cadre du phasage des travaux, il peut arriver que certains bâtiments, lotissements ou quartiers soient alimentés par des centrales provisoires (souvent alimentées au gaz). Cette possibilité est d’ailleurs explicitement prévue par le règlement communal d’urbanisme de la Ville de Fribourg. Il peut donc arriver qu’au niveau individuel, un propriétaire n’obtienne pas immédiatement la qualité d’énergie attendue. Néanmoins, les bilans de marquage de l’énergie doivent être faits au niveau du réseau et non du raccordement individuel. Cette manière de procéder est d’ailleurs la norme depuis plusieurs années en matière de marquage de l’électricité. Par exemple, un consommateur qui acquiert du courant 100% solaire mais dont le point de consommation se situe juste à côté d’une centrale nucléaire aura de fortes chances de voir arriver dans sa prise des électrons produits par l’atome. Il n’en demeure pas moins que la plus-value qu’il aura payée pour son électricité solaire aura réellement permis l’injection de ce courant renouvelable dans le réseau. Il s’agit du principe de "marquage de l’énergie".

Cela étant, dans la mesure où les questions n° 1 à 10 et la question n° 12 ne concernent pas un objet de l’administration du Conseil communal, mais directement l’activité de la société Groupe E Celsius SA, le Conseil communal n’est pas en mesure d’y apporter une réponse. Il prie M. le conseiller général R. Casazza d’adresser ces questions directement à Groupe E Celsius SA.

En ce qui concerne la question n° 11, le Conseil communal peut y répondre comme suit. En sa qualité d’actionnaire minoritaire, la Ville de Fribourg peut être force de proposition. L’étude qu’elle a entreprise pour identifier l’ensemble des potentiels de production de chaleur renouvelable sur le territoire communal visait d’ailleurs cet objectif. Parmi les potentiels identifiés, certains touchent des infrastructures ou des terrains publics. Dans ce cadre, la Ville dispose de leviers de discussion complémentaires. Ainsi, lorsque les potentiels énergétiques sont liés à l’infrastructure publique de la commune, cette dernière peut se retrouver partie prenante au projet en qualité de maître d’ouvrage. Il est par exemple envisagé de développer selon ce modèle l’infrastructure nécessaire à la valorisation des rejets thermiques de la STEP. Ces projets dans lesquels la Ville s’implique directement permettront d’accroître considérablement le volume de chaleur renouvelable disponible pour les réseaux CAD.

 

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